Session du Parlement européen Du 8 au 11 Février 2010 par Partrick Le Hyaric député de l’Ile de France au Parlement Européen
Voici les éléments essentiels de la session du Parlement européen qui s’est réuni du 8 au 11 février 2010.
Le fait marquant de la semaine est l’approbation en un seul vote du collège des Commissaires de la Commission « Barroso » par le Parlement européen. Mais que ce soit avant son intronisation, avec le débat sur les suppressions d’emplois d’Opel en Europe, ou après, avec le débat sur la situation des pays membres de l’Euro en difficultés, les réponses données par la nouvelle Commission restent dans la logique des traités ultra-libéraux, et toujours formulées dans une langue de bois insupportable.
Le Parlement a par contre rejeté l’accord SWIFT qui devait renouveler aux autorités américaines le libre accès aux données des comptes bancaires des citoyens européens. Ce refus de donner aux nord-américains un chèque en blanc sur l’accès à notre vie privée via nos achats, nos retraits, nos déplacements, est une victoire pour les droits fondamentaux du citoyen européen.
Election de la nouvelle Commission Barroso : les mêmes principes de concurrence et de liberté totale du marché demeurent
Mardi 9 février, le Parlement européen a approuvé en un seul vote la composition de la nouvelle Commission de José Manuel Barroso. Après avoir reconduit Barroso à ses fonctions en septembre par le jeu des alliances entre conservateurs du PPE (dont l’UMP), libéraux et une partie des socialistes européens (les socialistes français ont voté contre, ainsi qu’Europe-Ecologie), le Parlement a reproduit le même équilibre pour assurer au nouveau collège des Commissaires une confortable majorité.
Cette nouvelle Commission est encore plus à droite que la précédente (13 conservateurs, 8 libéraux et 6 socialistes). Le principal message politique qui est ressorti des auditions des Commissaires par le Parlement européen est l’application du Traité de Lisbonne. Or c’est ce traité qui fait primer la loi de la concurrence sur les droits sociaux et qui interdit à l’Europe une aide coordonnée aux Etats-membres les plus durement touchés par la crise économique comme la Grèce.
Comme l’a fait remarquer le Président de notre groupe de la Gauche Unitaire Européenne – Gauche Verte Nordique au Parlement, mon ami Lothar Bisky de Die Linke: « Les orientations politiques de la nouvelle Commission n’offrent aucune stratégie pour plus de justice sociale. Elles ne protègent pas l’Europe de la crise et ne fournissent pas de base pour s’attaquer avec succès à la pauvreté et l’exclusion sociale ».
Opel: une gestion antisociale
Lundi 8 février, le Parlement européen a débattu de la fermeture cette année de l’Usine Opel à Anvers.
Le cas Opel est un condensé de ce que l’Europe de la concurrence « pure et parfaite » peut faire : mettre en concurrence les travailleurs d’une même entreprise, en faisant jouer les uns contres les autres les sites du groupe afin d’améliorer la productivité tout en réduisant les charges salariales, et mettre en concurrence des Etats, par un chantage à la subvention publique, les « plus offrants » subissant « moins » de suppressions d’emplois sur leur territoire.
A ce jeu où tout le monde perd, les salariés d’Opel Anvers ont été les premiers sacrifiés. Sur les huit à dix milles postes que s’apprête à supprimer la direction d’Opel en Europe, 2 600 concerneront le site d’Anvers. Mais Opel va encore plus loin, en plus de ces milliers de licenciements, Opel demande 2,7 milliards d’euros aux Etats-Membres de l’Union européenne pour maintenir son activité.
La vision qu’a la Commission de cette tragédie est tout aussi alarmante : là où les Etats accordent des aides pour préserver l’emploi localement, la Commission ne voit que distorsion de la concurrence pouvant entraver le marché intérieur, tel était le cas pour les aides françaises à Renault pour maintenir des emplois en France. La Commission acte la fermeture en disant par avance qu’on va mettre quelques pansements sur la douleur des ouvriers licenciés sous forme de petites aides sociales pendant que l’entreprise continuera d’engranger ses profits !
Dans mon intervention j’ai rappelé que ce n’est nullement une logique industrielle qui prévaut à la décision de fermeture d’Opel Anvers, l’entreprise a réalisé 3,4 millions d’euros de profit, mais bien celle de la rentabilité du capital et de la mise en concurrence des travailleurs. Car Opel ferme ici pour aller exploiter des travailleurs sud-coréens.
Cette gestion est antisociale, elle se fait contre les territoires de l’Union européenne en brisant leur dynamisme et génère aujourd’hui des gâchis énormes.
J’ai donc demandé à la Commission :
- Une nouvelle stratégie européenne de coopération entre les groupes automobiles pour la recherche de nouveaux véhicules écologiques,
- Un effort de la Banque Centrale Européenne pour un crédit en faveur de l’emploi, de la formation et l’innovation,
- Une directive renforçant le pouvoir des salariés sur les décisions de leur entreprise via les comités d’entreprise ou de groupe, ainsi qu’une règle européenne permettant l’accès au bilan de toutes les entités d’un groupe pour que les représentants des salariés aient une vue d’ensemble de la santé financière de celui-ci.
J’ai repris cette demande dans une question écrite à la Commission et au Conseil ainsi que dans des amendements à un texte sur la responsabilité sociale des entreprises. pour la vidéo cliquez ici
Eurozone: un nouveau projet est nécessaire
Mardi 9 février le Parlement européen a débattu de la situation des pays en difficultés de la zone Euro. La crise économique a grandement mis à mal les finances de ces Etats, d’abord pris en otage par les établissements financiers qu’ils ont dû sauver, ensuite obligés de faire face au coûts économiques et sociaux engendrés par la crise. Les mêmes qui ont bénéficié du sauvetage des banques par les Etats spéculent désormais sur la faillite des pays les plus durement atteints par la crise : Grèce, Portugal, Espagne aujourd’hui, Italie et d’autres demain. Mais plutôt que faire face à ces attaques en présentant un front commun, c’est isolément que les Etats européens doivent résister à ces attaques, en pratiquant -pressés par la Commission- des coupes drastiques dans le financement de la protection sociale (santé, chômage, retraite, aides aux plus démunis…).
Dans mon intervention j’ai rappelé ces dures réalités ainsi que le carcan constitué par les traités de Maastricht et de Lisbonne, qui empêchent toute réponse commune. La liberté totale des capitaux inscrite dans ces traités a permis la mise en concurrence des systèmes fiscaux des Etats aux dépends de leurs finances. L’indépendance de la Banque Centrale et ses statuts interdisent toute aide à un Etat en difficulté, alors que la même Banque Centrale a prêté gratuitement de l’argent aux banques nationales, qu’elles mêmes ont reprêté à des taux d’intérêt d’environ 6%, ceci explique d’ailleurs la remontée de leurs profits.
Afin de ne pas faire payer cette crise aux citoyens j’ai demandé une refonte des objectifs de notre politique économique commune autour de nouveaux critères :
- Un pacte de développement humain pour l’emploi, le travail, le financement d’infrastructure écologiques.
- Un Euro qui soit une monnaie commune solidaire au service des peuples et une Banque Centrale favorisant par le crédit sélectif l’emploi, la formation, et la protection de l’environnement.
- La lutte contre la fraude fiscale, les paradis fiscaux et la taxation des opérations spéculatives.