La séance plénière de Strasbourg a été en partie consacrée aux auditions de la future Commission européenne. Chaque commissaire devant passer un oral devant la commission compétente du Parlement européen, ce sont donc 27 auditions qui ont été programmées. Le vote sur la nouvelle Commission devant se faire en bloc, il suffisait qu’une commission parlementaire évoque des doutes sur la candidature d’un commissaire pour que le calendrier soit remis en cause. 

Le mardi 19 janvier, la candidate-commissaire à l’aide humanitaire, la Bulgare Rumiana Jeleva a abandonné sa candidature. Ses compétences et les garanties de transparence financière et d’indépendance n’ont pas été jugées suffisantes. La candidate bulgare s’est donc retirée pour laisser la place à une autre candidature du même pays et de la même formation politique. Le vote sur le collège des commissaires doit avoir lieu le 9 février lors de la session plénière à Strasbourg.

 Audition des commissaires, les questions de fond demeurent

edfpiriou.jpgLe processus va certes être retardé, mais les questions de fonds demeurent. Le Président de la Commission cadre sa Commission, et ce cadrage s’est fait sentir lors des auditions des commissaires européens, beaucoup d’entre eux refusent de s’avancer sur des propositions nouvelles notamment pour une Europe sociale, l’environnement et pour les services publics. Les commissaires eux-mêmes sont bordés à la fois par les orientations du Traité de Lisbonne, et par la future stratégie économique -le processus Europe 2020, suite de la stratégie de Lisbonne- qui doit être débattue dans les prochaines semaines. De plus tous ces commissaires sont issus de gouvernements qui n’apportent aucune solution, ni à la crise de l’emploi, ni à la crise du pouvoir d’achat, ni aux dérèglementations. 

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Haïti, une solidarité qui doit s’inscrire sur le long terme et le respect de son indépendance

Mardi 19 janvier le Parlement européen a débattu, à notre demande,  de la situation en Haïti, juste après la nouvelle du terrible tremblement de terre qui avait frappé l’île. J’étais intervenu à plusieurs reprises sur l’urgence de l’aide à apporter à ce peuple déjà gravement fragilisé par le colonialisme et des années de dictatures, de gouvernements corrompus, mais aussi par le pillage systématique de ses ressources ou les plans d’austérité imposés par le FMI.

Dans mon intervention en plénière, je me suis félicité de l’élan de solidarité que nous constatons actuellement pour ce pays traumatisé par la violence du choc qu’il a subi. Mais cette solidarité doit s’inscrire sur le long terme et ne pas reproduire les erreurs du passé. Une première étape est l’annulation immédiate et inconditionnelle de la dette haïtienne. Un plan de reconstruction et de développement durable doit être lancé, sous l’égide de l’ONU, dont les haïtiens doivent être maîtres, de telle sorte que le peuple haïtien recouvre sa souveraineté économique et politique. 

Présidence espagnole. C’est au tour de l’Espagne de présider l’Union européenne.

Mercredi 20 janvier, le chef du gouvernement espagnol, José-Louis Zapatero, est venu présenter le programme de la présidence espagnole de l’Union européenne pour les 6 mois à venir.

La présidence se donne comme défi majeur la mise en place des nouveaux mécanismes du traité de Lisbonne, la promotion de la citoyenneté européenne, la conclusion d’accords bilatéraux avec des pays d’Amérique latine, la relance de l’Union pour la méditerranée, la construction d’une Europe « durable » au niveau social et énergétique (il prône le développement de nombreux projets énergétiques comme les interconnexions entre les réseaux, les énergies renouvelables, les voitures électriques), comme dans son agriculture et sa pêche.

Mais c’est surtout sur le programme économique de cette présidence que M. Zapatero a insisté. L’Espagne est très lourdement touchée par la crise résultant du système actuel (son taux de chômage est passé de 8 à 18% en une année). C’est pourquoi elle fait de la relance économique et de la définition d’une nouvelle politique économique européenne sa priorité.

L’Espagne propose une politique économique coordonnée entre Etats Membres qui pourrait même faire appel à un système de sanctions pour les obliger à suivre un programme économique. L’idée d’une coordination économique plus poussée entre Etats-membres peut-être une bonne chose si elle peut éviter une concurrence économique entre eux (notamment sur la fiscalité). A cet égard le débat sur la définition de la nouvelle stratégie économique « Europe2020″ d’ici juin retiendra toute notre attention et notre vigilance. 

SWIFT, les autorités américaines auront encore un large accès aux données bancaires des citoyens européens, bras de fer entre le Parlement et le Conseil

L’accord SWIFT permet au trésor américain, au nom de la lutte contre le terrorisme, d’accéder au registre de cette société basée en Belgique qui gère les transmissions de quelques 8000 banques dans le monde. Cet accord permet aux autorités américaines d’être informées sur toutes les opérations bancaires des citoyens européens : la trace bancaire des retraits et des achats permet de connaître la vie privée et les déplacements de chacun dans ses plus petits détails.

Mis en place depuis les attentats du 11 septembre 2001, l’accord arrivait à terme le 31 janvier. Le Parlement dans son intégralité veut se servir de ses nouveaux droits pour modifier cet accord et a envoyé une lettre commune au Conseil. Mais le Conseil semble avoir retardé la divulgation de l’accord pour limiter le temps d’appréciation du Parlement. Les mêmes qui souhaitaient vivement une application du traité Lisbonne ont préféré accélérer le processus afin d’éviter que le Parlement ne mette le nez dans ces questions sensibles. L’accord signé fin novembre avait été négocié spécialement avant l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne. C’est donc un accord intérimaire fait à la hussarde que les membres du Conseil vont imposer, retardant encore d’un an le droit de regard du Parlement européen sur un sujet aussi sensible que les données bancaires des citoyens européens. Mes collègues et amis de mon groupe, Cornelia Ernst, Ruis Tavares, et Marie-Christine Vergiat, se sont exprimés avec force contre la reconduction à la va vite de cet accord. 

Relations Union européenne/Tunisie, une dérive dangereuse du régime

Alors qu’il tenait ce jeudi 21 janvier un débat sur l’éventualité d’un rehaussement des relations avec la Tunisie, le Parlement européen s’est montré très divisé sur cette opportunité. Les conservateurs et libéraux européens se sont montrés favorables à la poursuite du dialogue avec la Tunisie alors que les Verts et notre groupe de la Gauche unitaire européenne – Gauche verte nordique nous sommes montrés critiques sur la dérive autoritaire du régime tunisien que nous constatons. Les socialistes étaient eux divisés par les différentes sensibilités de leur pays d’origine. Mon amie Marie-Christine Vergiat a une nouvelle fois dénoncé le raidissement du pouvoir Tunisien en rappelant le score de 90% obtenu par Ben Ali pour son cinquième mandat. Je partage entièrement cette inquiétude et la rejoins en dénonçant également le procès bâclé dont fait l’objet mon confrère journaliste Taoufik Ben Brik.