L’énergie nucléaire, sous contrôle public, est ici incontournable (26/07/2011)
POINT DE VUE : Comment répondre à la demande d’énergie des pays pauvres sans trop polluer la planète ? L’énergie nucléaire, sous contrôle public, est ici incontournable - texte collectif (*)
L’accident nucléaire majeur après le tremblement de terre puis le tsunami au Japon a occupé une place prépondérante dans l’actualité et dans les débats au sein des opinions publiques européennes. Cela a récemment amené l’Allemagne à revenir sur sa décision de prolonger la durée de vie de ses centrales, à confirmer sa sortie du nucléaire et la fermeture de celles-ci d’ici à 2022. On peut s’interroger sur une telle décision prise de manière précipitée et sans concertation avec ses partenaires européens. On est loin de la nécessaire coopération entre pays ! Le remplacement des mégawatts manquants se fera en partie avec des centrales thermiques, ce qui, d’après les experts, conduira à ce que l’Allemagne émette 20 % de CO2 supplémentaires !
Climat et énergie sont intimement liés et les enjeux sont planétaires. Ce serait donc une erreur de prendre ce débat par le petit bout de la lorgnette, c’est-à-dire, purement franco-français. Le débat sur la politique énergétique doit être axé sur la croissance de la demande énergétique et la réduction des inégalités sociales et économiques entre les peuples du monde entier et sur une vraie protection de l’environnement.
Au même titre que l’accès à l’alimentation ou à la santé, le droit à l’énergie est un élément déterminant pour l’émancipation et l’épanouissement des peuples, pour la réduction des inégalités. Cela reste une exigence moderne pour les communistes !
Pour asseoir leur développement économique, les pays les plus riches se sont appuyés majoritairement sur les ressources fossiles. Il en va donc de la responsabilité de ces pays, qui ont massivement utilisé ces ressources, de donner la priorité à d’autres modes de production d’énergie dont ils maîtrisent les technologies, d’investir beaucoup plus massivement dans la recherche pour obtenir des modes de production plus respectueux de la planète, de mettre en place de vrais plans d’économie et d’efficacité énergétiques. Par ailleurs, il reste urgent d’effectuer les transferts technologiques et de brevets nécessaires afin de permettre un développement humain durable respectueux de l’environnement pour les pays en développement et les pays pauvres.
Les défis à relever sont gigantesques. D’abord la consommation énergétique va croître pour deux raisons : l’une est l’accroissement de la population, qui devrait atteindre 9 milliards en 2050, l’autre réside dans le fait que les pays en développement ne peuvent élever leur niveau de vie qu’en augmentant leur consommation d’énergie.
D’autre part, les ressources fossiles sont limitées. C’est dès aujourd’hui que la raréfaction du gaz et du pétrole a des conséquences importantes. Elle conduit à l’exploitation complexe de gisements d’accès difficiles dans des conditions douteuses (gaz de schistes). Mais surtout elle est source de crises et de tensions au niveau international pouvant déboucher sur des conflits armés (de la Libye à l’Irak en passant par l’Afghanistan).
De plus, il nous faut nous inscrire dans les divers engagements celui de l’Union européenne avec l’engagement des trois 20 en 2020 : 20 % d’énergies renouvelables dans notre consommation, 20 % de gaz à effet de serre en moins, 20 % d’efficacité énergétique en plus, et celui des pays les plus riches qui se sont engagés à réduire de 80 % leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 pour ne pas dépasser une hausse des températures de plus de 2 ºC au cours du XXIe siècle. Les émissions de gaz à effet de serre proviennent pour l’essentiel de la combustion des énergies fossiles qui occupent encore une place largement prépondérante : 85 % dans le bilan énergétique mondial et même en France (environ 55 %). Les investissements vont devoir être considérables, estimés à plusieurs centaines de milliards d’ici à 2030 pour assurer à tous un droit à l’énergie, à des tarifs accessibles, lorsque l’on sait que 3 milliards d’êtres humains vivent, en 2011, avec moins de 2 dollars par jour. Notons que l’arrêt du nucléaire pour l’Allemagne augmentera la facture des usagers d’au moins 30 % !
Au regard de cette réalité, le PCF considère qu’en l’état actuel des connaissances et des délais nécessaires à la mise en œuvre de technologies nouvelles (Iter sur la fusion, captage du CO2 dans les centrales à charbon, 4e génération de centrales nucléaires, stockage de l’énergie, énergies renouvelables etc.), le recours à l’énergie nucléaire (fission) – avec une sûreté, une sécurité et une transparence renforcées – est incontournable au sein d’un mix éner- gétique sous maîtrise publique et donc dégagée de toute recherche de ren- tabilité financière à court terme contrai- rement à ce qu’organisent actuellement les partis de droite et le Medef dans le secteur (privatisation, sous traitance). Mix énergétique qui se construit et s’appuie sur les avancées scientifiques que nous fournit la recherche dans laquelle il faut s’engager de manière beaucoup plus forte qu’aujourd’hui. En effet, écarter une seule des ressources énergétiques, en particulier pour ce qui concerne notre pays, c’est aggraver la situation en continuant à faire la part belle aux énergies les plus nocives pour notre planète. C’est également accepter que le prix de l’énergie augmente de façon importante.
Nous nous doutons que lors de l’élection présidentielle et des élections législatives de 2012, il sera question de politique énergétique. Nous voulons pleinement participer à ce débat avec nos concitoyens et les autres forces politiques, syndicales et associatives. Nos différences, déjà actées au sein du programme partagé avec nos partenaires au sein du Front de gauche, mais également avec EELV et d’autres organisations, ne devront pas être gommées, bien au contraire. Nous pensons que le débat contradictoire franc et objectif permet d’avancer, en éclairant mieux les citoyen(ne)s. Celui-ci doit prendre en compte les aspects sociaux, économiques et environnementaux. Nous sommes déterminés à faire valoir notre point de vue de façon respectueuse mais tout autant offensive, notamment sur les directives européennes de libéralisation de l’énergie et la loi Nome, dont nous demandons l’abrogation.
(*) Parmi les signataires :
Marie-Claire Cailletaud, ingénieur, responsable syndicale, Valérie Gonçalvès, animatrice pôle énergie du PCF, Aurore Hernandez, membre du conseil national du PCF, militante syndicale, Claude Aufort, membre du conseil supérieur de la recherche et de la technologie (CSRT), Jean Barra, ingénieur, Hervé Bramy, responsable national à l’écologie du PCF, Jean-Claude Cauvin, ancien administrateur salarié du CEA, Olivier Decocq, miliant syndical, Luc Foulquier, chercheur en radioécologie, membre de la commission nationale écologie, Jean-Michel Gama, membre du groupe de réfl exion sur les énergies et l’environnement au XXIe siècle, Jean-Yves Guezenec, ingénieur, Sébastien Menesplier, militant syndical, Éric Roulot, membre du Conseil national du PCF, maire de Limay, Serge Vidal, ingénieur chercheur, Ludovic Zanolin, ingénieur, membre du comité national de la géothermie, maire adjoint de Fontenay-aux-Roses.
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