QUOTIENT FAMILIAL : LA GRANDE CONFUSION !
16/01/2012
Le système actuel de quotient familial est-il injuste socialement, comme l’affirme le Trésor ?
Jean-Marc Durand (1). Ce n’est pas mon avis. Une grande méprise a lieu autour de cette question. Le quotient familial est d’abord le fruit d’une politique familiale. À ce titre, il est normal que, dans une société développée où l’on souhaite nouer des solidarités intergénérationnelles entre différentes couches sociales, tout le monde puisse bénéficier de cette politique.
Les effets sont là puisque la France possède l’un des taux de natalité les plus élevés d’Europe grâce à cette politique, certes largement malmenée, mais qui existe. Le débat actuel revient à faire passer la droite pour le défenseur de la politique familiale, ce qui constitue évidemment une forfaiture.
Une réforme fiscale d’envergure ne devrait-elle donc pas s’atteler prioritairement aux demi-parts pour réduire les écarts de richesse ?
Jean-Marc Durand. On peut effectivement dire que la suppression du quotient familial revient à faire disparaître les demi-parts supplémentaires par enfant et à soumettre à l’impôt sur le revenu 500 000 familles aujourd’hui non imposables du fait de leurs difficultés. C’est également faire payer entre 1 000 et 2 000 euros d’impôts supplémentaires aux familles de couches moyennes faibles. Ce qui constitue un scandale.
Le PS veut augmenter les recettes fiscales car son objectif est de réduire le déficit. Le quotient familial est un élément déterminant pour obtenir des prestations sociales auprès de la CAF ou des collectivités. Si, demain, une personne non imposable voyait son impôt relevé par la suppression du quotient familial, elle verrait également ses autres prestations diminuer
Dès lors quelles devraient être les orientations d’une grande réforme fiscale ?
Jean-Marc Durand. Il faut s’atteler à une réforme profonde de l’impôt sur le revenu qui consiste à augmenter le taux sommital à 65 %, à recréer une progressivité en augmentant le nombre de tranches supplémentaires et à imposer le capital au même titre que le travail.
Il faut s’attaquer au cœur du problème, à savoir la fiscalité des entreprises, en réinventant un impôt sur les sociétés qui intègre de la progressivité en fonction du chiffre d’affaires et en le modulant en fonction des bénéfices pour développer l’emploi, les salaires et la formation. Il faut ensuite refonder l’impôt de solidarité sur la fortune au sein duquel il est nécessaire d’intégrer les fortunes professionnelles et de recréer une taxe professionnelle digne de ce nom à partir des actifs financiers. Enfin, nous portons l’idée de la suppression de la CSG.
Il est à ce titre nécessaire de revoir le financement de la protection sociale en soumettant les revenus financiers des entreprises et en augmentant les cotisations patronales en fonction de la part des salaires dans la valeur ajoutée et selon les catégories de branches professionnelles.
Entretien réalisé par Lina Sankari pour l'Humanité
(1) Jean-Marc Durand économiste, membre de la section économique du PCF.
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