PIERRE LAURENT ENTRETIEN AVEC LCP : PAUVRETE, SOCIAL, GAUCHE, FRONT DE GAUCHE
31/08/2011
Le nombre de personne sous le seuil de pauvreté a augmenté en France entre 2008 et 2009 en raison de la crise, selon les derniers chiffres de l’Insee. Il atteint 13,5% de la population. Au même moment, le niveau de vie des 10% les plus riches augmente légèrement de 0,7%. Le revenu médian s’élève à 1.590 euros par mois.
Pour remédier à ces écarts, « il faut totalement inverser la machine et faire contribuer le capital », selon Pierre Laurent, secrétaire national du PCF. Quant aux socialistes, « pour le moment, ce que nous entendons des différents candidats PS n’est pas à la hauteur de la situation », estime le communiste. Entretien.
La proportion de personnes vivant sous le seuil de pauvreté en France – 13,5% – a augmenté en 2009, selon des nouveaux chiffres de l’Insee. Comment inverser la tendance ?
On pourrait inverser la tendance mais à condition de tourner le dos aux politiques actuelles. Ce n’est pas en continuant, comme le propose le gouvernement, à amplifier l’austérité et le blocage des salaires, en faisant payer la crise au monde du travail, et en continuant à alimenter les banques en exonérations fiscales et sociales et en aides publiques, qu’on peut s’en sortir. Il faut totalement inverser la machine et faire contribuer le capital, dissuader la course aux rendements financiers, cesser d’alimenter les spéculateurs. Il faut mettre l’argent dans le développement social.
Le taux de 13,5% est bien « en dessous » de la réalité de 2011, selon le Secours populaire français, car la situation s'est depuis « considérablement aggravée ». C’est aussi votre sentiment ?
Bien sûr. On sait qu’il y a eu une aggravation. Tous les acteurs de terrain témoignent de l’augmentation dramatique de la pauvreté. Ils arrivent de moins en moins à faire face à cet afflux de pauvreté. On est dans une situation d’urgence. Le gouvernement propose la règle d’or budgétaire, c'est-à-dire la priorité au remboursement de la dette publique et aux marchés financiers. Les dépenses publiques et sociales sont mises entre parenthèse. C’est inverse qu’il faut faire. Il faut un moratoire pour ne plus donner d’argent aux spéculateurs. Il faut donner aux gens les moyens de vivre dignement. Il faut s’attaquer de manière drastique aux inégalités sociales. Il y a une irresponsabilité du gouvernement de dire que la seule question du pays serait le remboursement des créanciers qui ont joué sur l’endettement des ménages.
Côté Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon, que le PCF soutient, a ouvert ce week-end un dialogue avec le PS. Après s’être montré très offensif, il se montre depuis quelques mois plus conciliant, plus rond. Y a-t-il un changement de stratégie ?
Il n’y a pas de changement de stratégie. Il y a une amplification de la stratégie qui est la nôtre. La situation de crise est très forte. Le gouvernement est dans l’impasse. Ce n’est pas en pratiquant une course à l’échalote sur le degré de la politique de rigueur qu’on pourra opposer à la politique du gouvernement une alternative crédible.
La gauche ne doit pas courir après les thèmes de la droite et de Nicolas Sarkozy. Elle doit ouvrir des débats courageux sur les solutions à la crise. L’offre publique de débat que propose le Front de gauche, c’est de dire si nous voulons nous attaquer aux inégalités, alors nous devons aller ensemble au bout du débat. Les solutions du Front de gauche doivent être débattues par toute la gauche. Nous mettons sur la table des solutions.
Les réponses à la crise que donnent les principaux candidats de la primaire PS permettent-elles un éventuel accord de gouvernement ?
Pour le moment, ce que nous entendons des différents candidats PS n’est pas à la hauteur de la situation. Nous ambitionnons de changer cette situation. Nous ambitionnons un rassemblement très large autour de nos solutions. Est-ce que c’est en s’alignant sur les exigences européennes le plus vite possible qu’on va solutionner le problème ? Ce débat est ouvert et loin d’être clos. Est-ce que ce sera possible d’avoir un accord sur les solutions proposées par le Front de gauche ? Je ne sais pas encore. Mais c’est ce que nous visons, parce que la situation l’exige. Jean-Luc Mélenchon a eu raison de dire qu’il n’y aura pas de rassemblement à gauche sans nous, qu’il n’y aura pas de politique de gauche possible contre les solutions que nous proposons.
Pour les sénatoriales, le Parti de gauche menace de monter ses listes dans certains départements. Vous lui déconseillez ?
Il y a une exigence, que nous partageons totalement, qui est que toutes les composantes de la gauche doivent au minimum retrouver les sénateurs dont ils disposent, et si possible se renforcer. C’est possible car la gauche va gagner probablement 20 sièges. Donc quand le Parti de gauche exprime sa préoccupation, qu’il ne retrouve pas ses deux sénateurs, nous partageons ses préoccupations. Le PCF souhaite pour lui-même le maintien et le renforcement du nombre de ses sièges. Nous avons obtenus des accords satisfaisants. J’espère qu’au bout, nous n’arriverons pas à des listes concurrentes à gauche.
Entretien accordé à la chaîne de télé LCP
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