« Il faut développer le Lyon-Turin », Léon Deffontaines
09/02/2024
La tête de liste du PCF pour les élections européennes Léon Deffontaines, était en Savoie avec Fabien Roussel mercredi 7 et jeudi 8 février. Dans la vallée de la Maurienne, il a visité le chantier de la ligne ferroviaire Lyon-Turin qui permettra le développement du fret ferroviaire entre l’Italie et la France, respectivement deuxième et troisième puissances industrielles de l’Europe. Entretien à propos d’un sujet qui fait débat à gauche.
Pourquoi vous rendre sur le chantier de la liaison Lyon-Turin, qui fait débat à gauche ? N’est-ce pas une forme de provocation ?
Au contraire. Le chantier Lyon-Turin est un projet que nous souhaitions populariser et développer à l’échelle de l’Union européenne (UE). Avec Fabien Roussel, nous sommes allés rencontrer les acteurs, les salariés, les ouvriers qui travaillent. Ce projet est le type de grands travaux utiles que nous voulons défendre au Parlement européen. Si, conformément à l’objectif du Groupe d’experts international pour le climat (Giec) et de l’UE, nous voulons atteindre la neutralité carbone d’ici 2050, si nous voulons diminuer nos émissions de gaz à effet de serre, nous n’avons d’autre choix que de développer massivement le fret ferroviaire, de remplacer les camions par des trains.
Il faut savoir que circulent entre l’Italie et la France aujourd’hui 40 millions de tonnes par an, dont 8 % seulement passent par la ligne de fret ferroviaire existante. Le développement des infrastructures de fret, et notamment du tunnel entre la vallée de la Maurienne et l’Italie est indispensable pour développer le transport de ces marchandises d’un côté comme de l’autre.
J’ajoute que c’est un fret ferroviaire public qui doit être développé. Construire des infrastructures, c’est bien. Avoir des cheminots pour faire rouler les trains, c’est mieux.
Une partie de la gauche et des écologistes estime qu’il y a des alternatives au percement d’un tunnel, qu’il s’agit d’un projet ancien à stopper. La quantité de camions qui doit transiter dans la vallée pour évacuer les déblais est critiquée…
Ce sont des arguments fallacieux. Nous nous sommes rendus sur place pour voir ce qu’il en était réellement de ce trafic de camions. On a affaire à un chantier bas-carbone, plutôt exemplaire. Toute une partie est électrifiée. Une grande partie des gravats sont réutilisés pour faire du ciment et n’est pas évacuée par camion mais par des bandes transporteuses électriques, des sortes de tapis roulant qui transitent sur plusieurs kilomètres.
On nous parle d’alternatives. Le projet a été baptisé à tort Lyon-Turin. Il s’agit en réalité d’une ligne entre Séville en Espagne et l’Est de l’Europe, notamment Budapest en Hongrie. Aujourd’hui, à ce maillage ferroviaire manque précisément un petit chaînon qui est la liaison entre Lyon et Turin. Si nous voulons développer considérablement le fret ferroviaire, nous n’avons d’autre choix que de construire ce chaînon manquant, un tunnel de 57 kilomètres.
C’est ce qui fait qu’une part considérable de marchandises en Europe transite par voie routière, notamment entre l’Italie et la France. Cela se fait non seulement au détriment de l’environnement, mais également de la santé des habitants sur place. Tous les ans, en Savoie, 200 personnes meurent prématurément du fait du trafic routier. C’est un scandale sanitaire.
Est évoquée la possibilité de moderniser la ligne déjà existante. Pourquoi ne pas choisir cette option ?
Ce n’est pas possible. La ligne actuelle (qui passe à 1 200 m d’altitude, NDLR) étant en pente, on est obligés d’ajouter une locomotive à l’arrière du train pour monter. Ensuite, l’engin est obligé de revenir à vide. Il y a une limite matérielle à la quantité de marchandise qu’il est possible de faire transporter par le tunnel existant. En revanche, on appelle le tunnel en train d’être percé un tunnel de base car il est à la base de la montagne (en moindre altitude, NDLR).
Source, l'Humanité
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