Le député André Chassaigne déplore le ralliement du PCF à Jean-Luc Mélenchon
29/11/2016
Entretien réalisé par le journal La Montagne
Samedi, à l’issue de trois jours de scrutin, les militants communistes se sont prononcés à 53,6 % en faveur d’un soutien à Jean-Luc Mélenchon à l’élection présidentielle de 2017.
André Chassaigne, député PCF du Puy-de-Dôme et chef de file du groupe Front de Gauche à l’Assemblée nationale, défendait une ligne autonome. Il s'explique.
Vous avez milité pour l’autonomie. Vous êtes forcément déçu par ce résultat ?
C’est une déception car je pense que ça ferme la porte à un rassemblement qui aurait permis de construire une alternative crédible à la dérive libérale. Il est extrêmement important de mettre en échec la contre-révolution libérale de François Fillon ou la contre-révolution nationaliste de Marine Le Pen. Cette mise en échec exigeait de travailler au rassemblement de l’ensemble de la gauche anti-austérité et anti-libérale dans le respect de toutes ses composantes.
Certains affirment que les militants du PCF et de la France insoumise travaillent déjà ensemble sur le terrain...
Sur le terrain des luttes sociales, le ne croise pratiquement pas de militants de la France insoumise. Ils ont un fonctionnement de démocratie numérique. Ils ont une pratique politique qui n'est pas celle des communistes. Nous, on a une pratique politique et de terrain, de contact direct avec les personnes en difficulté.
Ce résultat ne révèle-t-il pas que le PCF est aujourd'hui profondément traversé par une crise identitaire ?
Je suis interrogatif sur la volonté de Pierre Laurent et de la quasi totalité des hauts cadres du parti qui ont tout mis en oeuvre pour qu'on puisse se rallier à Jean-Luc Mélenchon. C'est un constat de faiblesse et le constat qu'on ne croit pas en un Parti communiste qui a toujours sa place, qui puisse rassembler, qui porte des valeurs fortes. Maintenant, suite à ce vote, comment le PCF va être entendu durant cette campagne de l'élection présidentielle ?
Comment Pierre Laurent et le PCF pourront être parties prenantes de la campagne de Jean-Luc Mélenchon ? On n'a aucune réponse. Comment nos candidats aux législatives pourront incarner ce rassemblement en toute autonomie, notamment en ne signant pas la charte des Insoumis qu'on veut leur faire signer.
Pour moi, il y a cette inquiétude très forte concernant notre parole. On sait très bien qu'à une élection présidentielle, il y a une personnalisation, et tout se cristallise autour du candidat. Je ne vois pas comment nous pourrons porter une autonomie de parole dans une telle campagne électorale.
Après la présidentielle, viendront les législatives. Vous craignez de voir disparaître les députés communistes de l'Assemblée nationale ?
Le choix qui a été fait par Pierre Laurent, les hauts cadres du PCF et donc la majorité, a été en grande partie dû à la crainte de voir nos candidats concurrencés au premier tour par ceux des Insoumis, avec le risque que ces derniers empêchent les candidats communistes d'aller au second tour.
En 2012, dans les circonscriptions d'Ivry-Vitry, de Malakoff-Bagneux, de Saint-Denis, de Montreuil, du Havre, et d'autres, les candidats socialistes ont devancé de très peu les candidats communistes du fait de l'appel d'air François Hollande.
Il y a eu un manque de courage, la crainte que la concurrence des candidats des Insoumis de Jean-Luc Mélenchon handicape la possibilité d'être au second tour. C'est indéniable. Moi, j'ai un discours différent.
S'il y a un candidat des Insoumis, il faudra l'affronter, c'est une question de courage politique, et je ne porte pas la même notion du rassemblement parce que je pense que face au danger de la droite et de l'extrême-droite, il va falloir rassembler très largement. Nous aurons une forme de responsabilité ! Pour moi, ça nous impose de travailler à une alternative crédible.
Y a t-il un risque d'éclatement du PCF aujourd'hui ?
Non, absolument pas. Un choix majoritaire a été fait. Il sera appliqué en fonction de la conscience de chacun, mais je ne crois pas à un risque d'éclatement. Chacun fera preuve de maturité politique, ce qui ne veut pas dire qu'on aura tous le même engagement.
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