JIMMY'S HALL, COMMUNISTE ET IRLANDAIS !
06/07/2014
Jimmy est de toute évidence un type brillant qui aime la vie
La guerre civile a laissé des traces, mais un nouveau gouvernement a été élu, promettant davantage de justice. On parle de promesses, ce qui ne veut pas dire que les ennemis ancestraux ont disparu, en particulier un clergé exceptionnellement réactionnaire et des possédants ayant décidé qu’ils ont la loi pour eux.
C’est dans ce rapport de forces que Jimmy décide de rouvrir à la sollicitation générale de son entourage, en particulier la jeunesse, le hall du titre, un lieu de divertissement et de plaisir qui connut son heure de gloire avant destruction. Il faut dire qu’à New York Jimmy a eu l’occasion de découvrir d’autres lieux marqués par une société nouvelle, en particulier les clubs de Harlem où la musique emploie de nouvelles sonorités et où Blancs et Noirs se côtoient.
Jimmy décide donc que son hall sera progressiste, ouvert à tous, et que l’on pourra aussi bien y danser qu’étudier ou discuter, le tout à des tarifs défiant toute concurrence, une partie des activités étant le produit du bénévolat. Le succès est immédiat, mais sans pour autant déclencher un enthousiasme généralisé. L’adversaire a la dent dure, en particulier les curetons pour qui un tel lieu ne saurait être que de perdition, en particulier ceux qui traitent carrément Jimmy de communiste.
Le trait pourrait sembler gonflé mais la frontière est poreuse entre pratiquer le jazz et se livrer à des activités qualifiées de séditieuses, d’autres sociétés l’ont prouvé, aux États-Unis et dans la prude et conventionnelle Irlande.
Pour Ken Loach, l’idée était de montrer que la gauche n’est pas automatiquement déprimante, hostile au plaisir, à l’humour ou à la fête. Des vertus à réhabiliter, tout en étant fidèle à la structure même du récit. Jimmy Gralton est de toute évidence un type brillant qui aime la vie, même si le détail de son existence est inconnu, ce qui a laissé toute la possibilité de broder au niveau de l’écriture.
Une grande attention a été apportée aux décors, tournage dans le comté de Leitrim, construction du centre en décors naturels, volonté de travailler avec des vrais musiciens dans le refus de la piste sonore réenregistrée.
Tentative de recruter des comédiens sur place même si le choix était limité. Les parallèles entre l’Irlande de l’époque et d’aujourd’hui n’ont pas été oubliés. Pour Ken Loach, la crise financière de 1929 a encore des conséquences, des jeunes n’ont pas d’avenir et en Irlande, une jeunesse en quête de sécurité de l’emploi continue de privilégier la voie de l’immigration.
Avec ce nouveau long-métrage, Ken Loach reste fi dèle à lui-même
En revanche, Ken Loach ne compte pas sur le cinéma pour avoir une influence sur le débat politique. La responsabilité reposerait d’abord sur les films à gros budget qui vont d’abord dans le sens du statu quo et visent principalement à s’évader de la réalité. Le cinéaste est fidèle à lui- même. Il vient encore de magnifiquement le prouver.
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