André Chassaigne : "Nous avons ouvert des brèches"
09/04/2013
Le chef de file des députés Front de gauche, André Chassaigne (PCF), dresse le bilan de la bataille contre le projet de loi de flexibilisation du travail que son groupe a menée durant cinq jours et cinq nuits à l’Assemblée nationale.
À l’issue de la discussion à l’Assemblée nationale, êtes-vous satisfait des amendements apportés au texte ?
André Chassaigne. Non. Les modifications restent à la marge de ce que nous espérions, étant donné que tout amendement devait être validé par les signataires de l’accord. Certains n’ont pas été adoptés à cause de ce blocage. Cela a largement limité et réduit le pouvoir du Parlement.
Dans ces conditions, la bataille parlementaire que vous avez menée a-t-elle été utile à vos yeux ?
André Chassaigne. Elle n’a pas été vaine. Nous nous sommes fait les porte-voix du combat contre ce texte. On en a décortiqué, détaillé tous les articles, et nous avons effectué des opérations systématiques de défense d’amendements à plusieurs voix. Nous avons mené cette bataille pour qu’elle puisse servir d’appui à la mobilisation. Les parlementaires ont fait un énorme travail en poussant le gouvernement à s’expliquer, à se justifier et même parfois à avouer ses contradictions. Nous avons réussi à mener de front opposition aux articles de la loi et proposition d’alternatives, à l’instar du travail colossal mené sur les licenciements boursiers et abusifs. Notre groupe s’est fortement mobilisé jour et nuit, parfois jusqu’à quatre heures du matin, dans ce que nous estimons être la mère des batailles. Avec une nouveauté : le combat mené avec des députés issus d’autres rangs de la gauche sur des amendements signés ensemble. Nous avons ouvert les premières brèches. Des convergences politiques à gauche se sont manifestées pendant le débat. Cela a montré que l’on pouvait se rassembler pour dire au gouvernement : « Vous devez changer de cap, celui que vous avez pris n’est pas le bon. »
Dans les médias, l’affaire Cahuzac a occulté ce travail. Comment faire connaître plus largement les dangers que vous dénoncez dans ce texte ?
André Chassaigne. Le gouvernement a pu voir, et ce ne sera pas la dernière fois, que nous pouvons être les représentants du mouvement social. Nous avons été en quelque sorte l’amplificateur au Parlement des exigences de la manifestation d’aujourd’hui. C’est le prolongement de notre combat, mené à l’Assemblée nationale. Les sénateurs vont désormais se saisir du débat, en se servant des réponses qui ont été apportées pour continuer de pousser le gouvernement dans ses retranchements. Cette complémentarité aboutira peut-être à des modifications plus importantes que celles que nous avons obtenues.
N’est-il pas paradoxal qu’un gouvernement de gauche fasse voter une telle loi mais reste inerte face au scandale de l’évasion fiscale ?
André Chassaigne. Le scandale Cahuzac n’est qu’une illustration de l’impasse de l’orientation du gouvernement sur laquelle il ne veut pas revenir. C’est un formidable révélateur de ce à quoi conduit cette politique. En définitive, on se bat contre un projet de loi qui fait supporter les conséquences de la crise aux salariés alors que, dans le même temps, l’argent récolté par les patrons part dans les paradis fiscaux. Les actionnaires s’enrichissent grâce à des mesures qui remettent en cause le Code du travail.
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