Pierre Laurent « Il y a un grand mensonge sur les responsabilités de cette crise »
11/08/2011
Après l’addition sociale présentée aux peuples par les gouvernements, voici que se profile une « addition démocratique », dénonce le secrétaire national du PCF.
Face à la crise de la dette, l’Allemagne vient de suggérer un « conseil de stabilité » qui passerait au-dessus des gouvernements. Une mesure forte, ou au contraire un abandon ?
Pierre Laurent. Non seulement il faut refuser cette nouvelle capitulation que serait cette proposition allemande, mais il faut arrêter cet engrenage de soumission aux marchés financiers, qui manipulent l’information pour mettre en coupe réglée peuples et gouvernements. Il y a un grand mensonge dans la crise actuelle sur les responsabilités de cette crise. Les marchés ne sont pas une main invisible, derrière eux il n’y a que des groupes, des milliardaires, des gouvernements aussi, qui cherchent à obtenir le paiement de la crise par les peuples par tous les moyens, et au fur et à mesure que leurs solutions échouent, ils en rajoutent sur l’addition sociale, et maintenant sur l’addition démocratique. On demande aux gouvernements et aux peuples de rendre les armes.
« Apaiser les marchés », comme le réclament les analystes financiers, est donc une aberration ?
Pierre Laurent. C’est insupportable ! Il faut inverser la machine qui veut que les groupes de spéculateurs qui agissent au plan mondial tentent de soumettre les peuples à leur botte. C’est aux gouvernements de soumettre les marchés au contrôle politique et démocratique, et de redonner du pouvoir aux parlements et aux citoyens. Il y aurait besoin dans chaque pays et au plan mondial de commissions d’enquête sur les conditions dans lesquelles les marchés sont manipulés pour imposer un chantage financier qui débouche systématiquement sur des plans d’austérité de plus en plus drastiques. On voit bien qu’après le monde arabe, c’est Israël qui se révolte contre la vie chère, l’Europe, les États-Unis : c’est une affaire mondiale.
Le précédent grec vous inspire la méfiance...
Pierre Laurent. C’est incroyable qu’à chaque nouvel épisode, on feint d’oublier le précédent : comme si chaque nouvel épisode de la crise était une météorite tombée d’on ne sait où. La crise grecque et la crise américaine ont la même origine. En ne s’attaquant pas à la spéculation financière et à ceux qui organisent le chantage contre les dépenses publiques et sociales, à chaque fois on aggrave le mécanisme qui y conduit. Sommet après sommet, on nous annonce des solutions qui en vérité amplifient la crise, face à des spéculateurs insatiables en raison de leurs pertes financières.
On oppose volontiers que, dans une économie mondialisée, reprendre la main n’est pas réalisable.
Pierre Laurent. Ce sont les gouvernements qui décident de laisser la main aux spéculateurs. Les décisions du G20 sont des décisions d’abandon du contrôle de la situation. Nous pouvons prendre des décisions qui seront des décisions de combat des marchés financiers. Taxer les flux financiers, reprendre le contrôle des banques, reconquérir du pouvoir politique pour organiser une politique de relance économique et sociale qui ira contre les intérêts de rentabilité imposés par les marchés.
La France peut-elle jouer un rôle ?
Pierre Laurent. Ces décisions peuvent être prises à tous les échelons, national, européen, et maintenant mondial. Cela se fait en s’appuyant non pas sur les décideurs du G20 mais sur les forces sociales qui n’en peuvent plus, sur les forces syndicales, sur tous les citoyens qui sont mobilisés comme on le voit, pays après pays. Oui, la France peut prendre la tête d’un mouvement mondial contre l’austérité généralisée.
Pour l’heure, Nicolas Sarkozy ne croit qu’en sa « règle d’or » budgétaire.
Pierre Laurent. Pour que la France joue le rôle que je viens d’évoquer, nous avons un impératif qui est de chasser Sarkozy et ceux qui le soutiennent, pour reconstruire un pouvoir démocratique qui s’attaquera à cela. Ça doit commencer par une bataille politique pour refuser d’inscrire l’austérité dans la Constitution française. Il y a une bataille à mener dans les semaines à venir, quand on voit au Parti socialiste que certains commencent à avoir les genoux qui flanchent devant l’offensive de la droite. Nous devons faire que la gauche refuse en bloc la « règle d’or », qu’elle la refuse quand Nicolas Sarkozy la proposera au vote, et qu’elle la refuse si elle accède au gouvernement de ce pays.
1 commentaire
J'apprécie beaucoup cet article de Pierre Laurent. Bien sûr, je suis tout à fait d'accord avec lui, mais je le trouve facile à lire, écrit avec des mots simples, à la portée de toutes les citoyennes et de tous les citoyens, même ceux qui ont été obligés de quitter l'école trop tôt. Oui, Pierre Laurent s'adresse au Peuple, à tout le Peuple conformément au Projet Partagé du Front de Gauche. De plus, on sent derrière les mots une indignation, une révolte qui m'émeut. Il faut absolument sauver notre indépendance pour sauver notre démocratie. Pour cela, il faut rester unis. Sincèrement,que représente UN poste de sénateur ou de député face au terrible tournant de l'Histoire de l'humanité qu'une oligarchie égoiste et tyrannique veut nous imposer ?
Méfions-nous des sirènes de ceux qui se prétendent de gauche alors qu'ils ont trahi le peuple en votant majoritairement le traité de Lisbonne. Alors, en avant, camarades, et tous ensemble, pour le Peuple, pour les Peuples. Danièle Dugelay (PG/FG)
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